
[Fiction]
Elle restait là, assise, devant la maison, à ne rien faire. Les yeux dans le vague, elle rêvait d'une vie meilleure, sans soucis, heureuse. La musique résonnait dans ses oreilles, la main fixée fermement à son lecteur mp3. Elle comprenait bien l'importance aujourd'hui de la musique. Ce n'était pas comme ça, avant. Oui, avant. Du temps où les soucis étaient de récolter une bonne note à son prochain contrôle ou de savoir quelle était la date du prochain spectacle de danse afin de se préparer. Désormais, plus rien ne serait pareil. Elle demeurait immobile, n'attendant plus rien, et n'espérant plus rien. La vie en avait déjà assez fait. Pour elle, la vie n'avait plus de valeur. A quoi bon ? Elle s'accrochait aux autres, ces inconnus, croisés tous les soirs, aussi vite arrivés que repartis. Oui, c'était mal, mais cela était la seule solution. Soudain, une sonnerie retentit. Son téléphone. Correspondant : sa colocataire, Zoé. Non, elle ne répondrait pas. Elle était censée travailler dans un petit restaurant. Pourquoi les gens cherchent-ils toujours à savoir tout de nous ? Elle détestait s'ouvrir aux autres, avoir n'importe quel contact humain. Les psychologues avaient beau dire que c'était dû à un manque d'affection, que c'était un problème, pour elle, c'était comme ça, et cela lui convenait à merveille. L'affection sonnait faux pour elle.
Une première voiture. Elle savait ce qui l'attendait. Elle savait qui s'y trouvait. Cela faisait aujourd'hui un an. Elle garda pour elle-même cette remarque, de peur qu'il ne fuie, sachant son refus de tout engagement. "Il n'aime pas s'engager mais revient toutes les semaines durant un an pour moi", pensa-t-elle. "C'est assez contradictoire". La voiture s'engagea dans l'allée, et elle se leva. Il sortit afin de lui ouvrir la portière. Elle s'assit calmement, ne dit pas un mot. Il fit de même. Il démarra, toujours sans un mot, et la voiture se dirigea vers la rue où il habitait. Comme d'habitude. Leur situation et leur histoire n'étaient pas ordinaire. Bien au contraire. Personne n'était au courant, pas même Zoé. Et pourtant, vu la tournure des choses, elle aurait mieux fait de se confier à elle. Il avait beau dire qu'il y avait peu de sentiments derrière tout cela, elle était certaine du contraire. Toutes ces nuits passées à discuter devaient bien cacher quelque chose. Oui, ils discutaient, rien de plus. D'ailleurs, elle avait diminué ses "rencontres" avec les autres. Un lien s'était créé entre elle et lui, et elle tenait à le préserver. Tandis que les hommes la traitaient comme un simple objet, lui la considérait comme un être à part entière, quelqu'un d'important. Dans ses yeux, elle n'était plus une bonne à rien, sans but précis ni passion. Elle était bien plus.
La voiture s'arrêta. Les deux amants sortirent, calmes et silencieux, montèrent dans l'appartement et s'assirent face à face. Il la prévint d'une nouvelle, une bonne nouvelle. "Jamais je n'avais rencontré quelqu'un d'aussi bien que toi ", disait-il. Troublée, elle se mit à croire qu'il allait la quitter. Quitter était-il le bon terme ? Techniquement, ils n'étaient pas ensemble. Leurs nuits passées à discuter étaient son gagne-pain, et lui son moyen de libération. Allait-il lui annoncer que c'était fini, mettre un terme à cette année ? Les autres, eux, ne donnaient pas de nouvelles, tout simplement, ils ne faisaient pas de longs discours. Mais cela devait être une bonne nouvelle. Lui, les mains tremblantes, le coeur battant à tout rompre, se leva de sa chaise. Il posa alors un genou à terre. Elle n'était pas sûre de comprendre. Lui n'était pas sûr de sa réponse. Il fouilla ensuite dans sa poche, en sortit une petite boîte bleue. Elle comprit. Et se mit à pleurer. Elle savait que ce moment serait le plus beau de sa vie. Elle qui n'y croyait plus, et lui qui représentait sa seule lumière dans un avenir aussi sombre. Il ouvrit la boîte, plus incertain que jamais. Elle sourit, les larmes ruisselant sur ses joues. Sa question était silencieuse, mais se lisait dans ses yeux. "Oui", fit-elle, en se lançant dans ses bras. Plus jamais elle ne désespérera, parce qu'il sera là. Et comme s'il lisait dans ses pensées, il affirma : "Plus jamais tu ne seras seule, je serais toujours là."
DPI, en dédicace à Chloé ;).
Pgm.